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Enlèvement international d'enfant - déplacement illicite d’enfant - Cour de Cassation 28 février 2018

Le 30 mai 2018

Cour de Cassation 1ère chambre civile – 28 février 2018 n° de pourvoi 17-17624 

Le retour ordonné de deux enfants de 18 mois, en Irlande, déplacés en France par la mère.

Les faits étaient les suivants.

 

Deux jumeaux de 18 mois étaient nés en France et y avaient résidé avec leurs parents.

Le père avait trouvé un emploi en Irlande, qui avait conduit la famille à déménager. Il justifiait que les époux avaient pris un logement à bail sur le territoire irlandais et y ouvert un compte bancaire joint. Il produisait une attestation de résidence et des cartes de soins établissant que les enfants étaient suivis en Irlande.

La mère était repartie en France, seule avec les enfants.

Le père avait alors saisi l'autorité centrale irlandaise sur le fondement de la Convention de la Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants aux fins de voir ordonner leur retour immédiat.

L’autorité centrale irlandaise avait saisi l’autorité centrale française.

Le procureur de la République avait assigné la mère devant le juge aux affaires familiales afin de voir ordonner le retour immédiat des enfants au domicile de leur père.

 

En première instance, le retour des enfants n’avait pas été ordonné aux motifs que les enfants étaient nés en France et qu’il y avaient toujours vécu, hormis quelques séjours accompagnés de leur mère, en Irlande, pour voir leur père. Qu'ils étaient suivis médicalement en France depuis leur naissance de manière stable bénéficiant, comme leurs parents, de la sécurité sociale. Que ceux-ci payaient leurs impôts en France et qu'il était établi que la mère avait toujours assuré seule le quotidien des enfants qui venaient d'intégrer une crèche.

 

Or, la Cour d’appel a infirmé le jugement en décidant que la présence physique, en Irlande, des deux enfants âgés de 18 mois, avant leur déplacement en France, n'avait pas revêtu un caractère temporaire ou occasionnel.

 

Le retour des enfants au domicile du père a donc été ordonné en appel.

 

La mère a alors fait un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la Cour d’appel.

 

Dans le cadre de son pourvoi, elle a contesté la décision prise par la Cour d’appel ayant fixé la résidence habituelle des enfants en Irlande. Elle a indiqué qu’en vertu des articles 3 et 4 de la Convention de la Haye du 25 octobre 1980 et des articles 2, 11), et 11 du règlement (CE) du Conseil n° 2201/2003 du 27 novembre 2003, la Cour aurait dû s’attacher à examiner la commune intention des parties quant à l’établissement de la résidence habituelle des enfants.

Elle a précisé que la fixation de la résidence habituelle des enfants en Irlande ne résultait nullement d’une commune intention des parties. Que le choix de l'Irlande était celui du père qui était parti y chercher du travail sans qu’elle n’ait, quant à elle, manifesté son intention d’y résider avec les enfants. Elle ajoutait qu’elle avait demandé le divorce en France et porté plainte contre son mari pour violences.  

Elle concluait donc que la présence physique des enfants, en Irlande, à la demande du père, n’avait revêtu qu’un caractère temporaire.

 

Or, la Cour de Cassation ne l’a pas suivi dans ses moyens.

 

Ainsi, dans son arrêt, la Cour de Cassation a indiqué :  

« au sens des articles 3 et 4 de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de
l’enlèvement international d’enfants, 2, 11), et 11, § 1, du règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003, est illicite tout déplacement d'un enfant fait en violation d'un droit de garde exercé effectivement et attribué à une personne par le droit ou le juge de l'Etat dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle avant son déplacement ;

qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (arrêts des 2 avril 2009, A, C-523/07, 22 décembre 2010, Mercredi, C-497/10 PPU, et 9 octobre 2014, C, C-376/14 PPU) que la résidence habituelle de l’enfant doit être établie en considération de facteurs susceptibles de faire apparaître que la présence physique de l’enfant dans un Etat membre n'a nullement un caractère temporaire ou occasionnel et qu'elle correspond au lieu qui traduit une certaine intégration dans un environnement social et familial ;

qu'à cette fin, doivent notamment être pris en considération non seulement la durée, la régularité, les conditions et les raisons du séjour sur le territoire d'un Etat et du déménagement de la famille dans cet Etat, la nationalité de l’enfant, le lieu et les conditions de scolarisation, les connaissances linguistiques ainsi que les rapports familiaux et sociaux de l’enfant dans ledit Etat, mais également l'intention des parents ou de l'un des deux de s'établir avec l’enfant dans un autre Etat, exprimée par certaines mesures tangibles telles que l'acquisition ou la location d'un logement dans cet Etat ; 


Attendu que l'arrêt relève que, si les enfants sont nés en France le [...] , M. Z... A... a trouvé un emploi en [...] à compter du 13 août suivant, ce qui a conduit la famille à déménager à [...], Comté de [...], ainsi qu'en attestent le bail du 1er septembre 2015 au nom des deux époux, les factures afférentes à ce logement établies à leurs deux noms, l'ouverture d'un compte joint en [...], une attestation de résidence, les cartes des services publics pour chacun d'eux et les cartes de soins pour les enfants, ainsi que leur enregistrement dans un cabinet médical [...] à compter du 4 septembre 2015 ;

Qu'il ajoute que, lorsqu'elle a séjourné en France en 2015 et 2016, Mme X... a été hébergée chez ses parents, de sorte qu'à compter du mois d'octobre 2015, il n'y a plus eu, en France, ni résidence habituelle du couple, ni domicile personnel de Mme X... ;

Que, par ces motifs, qui font ressortir l'intention des parents de fixer la résidence habituelle des enfants en [...] et l'absence de caractère temporaire de ce déménagement, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef ; »


Par ailleurs, et sur le moyen soulevé par la mère évoquant un risque de danger grave en cas de retour des enfants en Irlande tel que visé par l'article 13 de la Convention de la Haye, et le fait que, pour des enfants de 18 mois, un retour en Irlande nécessiterait des efforts de réadaptation dans un domicile dont les enfants ont été absents au moins une année, et qu’ils n’avaient jamais quitté leur mère, la Cour de Cassation a indiqué : 


Mais attendu que l'arrêt relève, d'une part, que les allégations de Mme X... quant à l'inaptitude du père à prendre en charge les enfants, à sa violence ou son alcoolisme ne sont pas établies, d'autre part, que les enfants ont vécu en [...] pendant plusieurs mois dans de bonnes conditions matérielles et sociales, de sorte que, si leur retour nécessitera des efforts d'adaptation pour eux deux, il n'existe pas de risque grave que ce retour les expose à un danger ou les place dans une situation intolérable ; que la cour d'appel, qui a statué en considération de l'intérêt supérieur des enfants, lequel réside dans le maintien des liens avec leurs deux parents, a ainsi légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ; » 

 

 

Ainsi, la Cour de Cassation a mis en avant le critère afférent à l’intérêt des enfants de maintenir des liens avec ses deux parents.



 

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