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CONTRAT DE BAIL - TROUBLES DE VOISINAGE

Le 16 décembre 2014

La responsabilité du bailleur peut être mise en cause lorsque son locataire est l'auteur de troubles de voisinage.

Les personnes, victimes de troubles de voisinage commis par un locataire, étaient, anciennement, tenus d'agir exclusivement à l'encontre de ce dernier. Elles étaient contraintes d'assigner celui-ci sur le terrain de la faute ou sur le terrain du manquement à son obligation de jouir paisiblement des lieux loués, de même qu’elles étaient tenues d'établir le préjudice personnel qui en résultait pour elles.

Depuis 1987, la Cour de Cassation leur reconnaît la possibilité d'agir directement à l'encontre du bailleur tenu d’une véritable obligation à leur égard en cas de troubles de voisinage.

 

Cour de Cassation 3ème chambre civile Bull Civ n° 150

« Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 mars 1985) d'avoir condamné Mme X..., propriétaire d'un immeuble, à réparer le préjudice causé à divers copropriétaires et au syndicat des copropriétaires d'un immeuble voisin par des troubles anormaux de voisinage émanant de son locataire, alors que, d'une part, la réparation du préjudice né de troubles de voisinage serait une obligation personnelle au seul auteur des troubles, et détachée du droit de propriété, et alors que, d'autre part, les cas de responsabilité du fait d'autrui seraient limitativement énumérés aux alinéas 4, 5 et 6 de l'article 1384 du Code civil ;

Mais attendu que lorsque le trouble de voisinage émane d'un immeuble donné en location, la victime de ce trouble peut en demander réparation au propriétaire, qui dispose d'un recours contre son locataire lorsque les nuisances résultent d'un abus de jouissance ou d'un manquement aux obligations nées du bail ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; (…) »

 

Cour de Cassation 3ème civile 17 avril 1996 Bull Civ III n° 108

« Vu le principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 29 mars 1994), que la société civile immobilière Blaise Bruno (SCI), propriétaire d'un local à usage commercial dans un immeuble en copropriété, l'a donné à bail à Mme Y... ; que se plaignant de nuisances acoustiques, Mme X..., agissant en qualité de syndic de la copropriété et en son nom personnel, a assigné la SCI et Mme Y... en exécution de travaux et paiement de dommages-intérêts ;

Attendu que, pour débouter Mme X... de ses demandes à l'encontre de la SCI, l'arrêt retient que les travaux de mise en conformité des lieux sont, selon le bail, à la charge de la locataire et que son inaction ne peut être reprochée à la bailleresse qui a adressé à Mme Y... des mises en demeure de mettre un terme aux nuisances ;

Qu'en statuant ainsi, alors que la victime d'un trouble de voisinage trouvant son origine dans l'immeuble donné en location, peut en demander réparation au propriétaire, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; ».  

 

Cour de Cassation 2ème chambre civile 31 mai 2000 Bull Civ II n° 94

Les faits, objets de cet arrêt, étaient les suivants.

Mme X..., propriétaire d'une maison, se plaignait de bruits provenant d'un parc d'attractions installé sur un terrain situé à 500 mètres de chez elle, appartenant aux consorts Y... qui, chaque été depuis des années, le donnaient en location au Syndicat national des artisans forains, qui le mettait à la disposition de forains qui y installaient des manèges et attractions;

Les consorts Y... faisaient grief à la Cour d’appel de les avoir condamnés à payer à Mme X des dommages-intérêts. Ils évoquaient le fait que l'activité du parc d'attractions ne constituait pas en elle-même un trouble et qu'il n'était pas établi qu'elle ne s'exerçait pas dans le respect de la réglementation relative au bruit. Ils indiquaient également que, pour les dernières années, ils avaient fait insérer dans les contrats de sous-locations conclus avec les forains une clause demandant la suppression des micros et de la musique.

Toutefois, la Cour d’appel avait relevé, au vu des éléments produits, que les nuisances sonores excédaient largement la moyenne autorisée, en outre en période nocturne, et que celles-ci constituaient pour Mme X... un trouble grave excédant les inconvénients normaux du voisinage. Elle a, par ailleurs, noté que les consorts Y... ne pouvaient ignorer ces nuisances mais qu’ils renouvelaient néanmoins la location de leur bien chaque été.

En l’état de ces constatation, la Cour de Cassation a indiqué « qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a souverainement apprécié l'existence de troubles anormaux du voisinage émanant de l'immeuble donné en location par les consorts Y... et décidé à bon droit que, indépendamment de toute faute de leur part, les propriétaires étaient tenus d'en réparer les conséquences dommageables subies par un tiers ; »

 

Aux termes de cet arrêt, la Cour de Cassation ne s'est pas préoccupée du point de savoir si le bailleur avait ou non commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité. Elle a considéré qu'il était tenu de garantir les victimes des troubles par elles subis du fait de son locataire.


C’est aux victimes de mettre en cause la responsabilité du bailleur.


Par ailleurs, s'agissant des nuisances sonores subies dans un immeuble, le syndicat des copropriétaires a été reconnu comme disposant d'un intérêt à agir à l'encontre du bailleur sur le terrain de la violation du règlement de copropriété et de l’article 15 de la loi du 10 juillet 1965.

Il s’est vu reconnaître, en cas de troubles excédant les inconvénients normaux de voisinage, le droit de mettre en cause la responsabilité du bailleur et de son locataire.


Cour de Cassation 3ème civile 24 octobre 1990 Bull Civ III n° 205

Dans cet arrêt, les faits étaient les suivants.

Après avoir placé leur immeuble sous le régime de la copropriété, les propriétaires avaient vendu à M. X. les locaux à usage commercial situé au rez-de-chaussée avec le droit d'effectuer des travaux. Ce dernier avait donné à bail les locaux à une Pizzeria.

Les copropriétaires, se plaignant de subir des nuisances du fait de l’exploitation de ce commerce,le syndicat des copropriétaires avait sollicité la condamnation du bailleur et de son locataire à réaliser des certains aménagements. Il avait en outre réclamé des dommages et intérêts.

La Cour d’appel avait débouté le syndicat de sa demande en énonçant que les émanations de fumées et de suies étaient la conséquence normale d'un appareil de combustion, qui n'était pas prohibé par les règlements ;

Or, la Cour de Cassation a cassé cet arrêt en indiquant qu’il appartenait à la juridiction saisie de rechercher si, tel que le prétendait le syndicat, lesdites émanations n'excédaient pas les inconvénients normaux du voisinage.

Elle a donc, ce faisant, reconnu au syndicat la faculté d’agir à l’encontre du locataire et du bailleur sur ce terrain au nom des copropriétaires.

Enfin, le syndicat peut même solliciter la résiliation du bail sur le fondement de l’action oblique. Il se substitue alors au bailleur en se prévalant d’une violation par le locataire aux clauses de son bail relatives à la jouissance paisible en bon père de famille.

 

Cour de Cassation 3ème 24 octobre 1990 Bull Civ III n° 205

« Qu'après avoir relevé que la société A avait contrevenu aux obligations découlant de son bail et que ses agissements, qui causaient un préjudice aux autres copropriétaires, étaient en outre contraires au règlement de copropriété, l'arrêt qui retient que ce règlement déclare chaque copropriétaire responsable des agissements répréhensibles de ses locataires, en a exactement déduit qu'en raison de la carence de Mme x... et de m. z..., le syndicat des copropriétaires avait le droit d'exercer l'action en résiliation du bail ; »


Précisons enfin que, dans un arrêt du 23 mars 1994, la Cour d’appel de DIJON a reconnu à un copropriétaire le droit de demander la résiliation du bail d’une salle de jeux, dont l'activité bruyante troublait sa tranquillité.

De même, la troisième Chambre Civile de la Cour de Cassation, dans un arrêt du 4 janvier 1991, a déclaré un copropriétaire recevable à exercer l’action oblique contre un locataire se livrant à une activité contraire à la destination de l’immeuble.


Maître Dominique Ponté 

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